Cette année, le jour du dépassement mondial avait lieu le 28 juillet dernier, soit encore quelques jours plus tôt que les années précédentes.
Le jour du dépassement est la date à partir de laquelle notre empreinte écologique dépasse la capacité de la planète à produire ce que l’homme consomme en un an. Nous avons donc pêché plus de poissons, abattu plus d’arbres, émis plus de gaz à effet de serre que ce que nos océans et forêts peuvent absorber, construit et cultivé sur plus de terres que ce que la nature peut nous procurer en une année. Pendant les 156 jours de l’année restant, l’humanité vit de l’épuisement de la biosphère et il faudrait 1,75 planètes comme la nôtre pour subvenir à nos besoins (Source Weactforgood.com).
L’une des principales causes de ce dépassement provient de notre système agricole et alimentaire.
Cette année, je n’ai pas publié d’article le jour-même. (Est-ce que je me lasse de donner chaque année le jour du dépassement dans ce blog et de voir qu’il est de plus en plus proche du début de l’année ?) Mais un épisode fortuit me conduit aujourd’hui à mentionner de nouveau l’importance de notre consommation alimentaire.
Ce samedi, de manière vraiment exceptionnel et un peu par hasard, je me trouvais dans le Monoprix du CNIT à La défense. Et en parcourant rapidement le magasin, après avoir cherché en vain un article, je me trouvai stupéfaite face à des étagères réfrigérées totalement vides de tout produit, des affichettes mentionnant un problème technique. Le magasin était désert, et pour cause. Mais à la caisse automatique, je trouvai une employée esseulée et lui demandai ce qu’il s’était passé. Avec une tristesse non feinte, elle m’expliqua la panne électrique pendant la nuit qui conduisit à vider tous les rayons frais et à jeter les produits. Des milliers de produits balancés aux ordures. A cause des normes, me dit-elle, ils ne pouvaient donner les produits ni aux employés ni aux associations alimentaires.
Et le pire, c’est que c’était la troisième fois qu’ils balançaient tous les produits à cause d’une panne électrique, en peu de temps. Mais comment ce magasin n’avait-il pas mis en place un groupe électrogène pour pallier ce problème ? Le magasin ne pouvait pas se le permettre, me confia-t-elle, puisque les normes imposaient un local spécial pour cela et ils n’avaient pas la place.
Alors des kilos de produits encore mangeables par des familles dans le besoin, ou pas d’ailleurs, peu importe en la circonstance, avaient finis dans des poubelles, à cause de normes, et aucune solution ne serait mise en place pour arrêter ce gâchis, encore à cause des normes.
Cette douce vendeuse en avait pleuré et moi, j’avais bien envie de faire comme elle. Mais j’étais tellement stupéfaite que le seul sentiment qui m’est venu était un sentiment de résignation.
Et ce jour du dépassement qui avance de plus en plus d’année en année, à quoi s’ajoutent les canicules de cet été, accompagnées d’incendies dévastateurs, me fait penser que sans doute l’énergie que je mettais jusqu’à maintenant à prêcher la bonne parole pour inciter à consommer mieux, à mieux s’alimenter, avec des produits locaux, en direct des producteurs, tout cela est peut-être vain et sans espoir, car nous ne serons jamais assez nombreux à endiguer ce vers quoi nous nous dirigeons.
A l’AMAP, je n’ai pas besoin de convaincre, tout le monde est convaincu. Mais autour de moi, combien encore de personnes, y compris des jeunes gens me disent qu’ils n’ont pas le temps d’acheter des bons produits, de se préoccuper de la provenance ou de la manière dont cela a été produit ou que c’est trop cher pour eux, alors qu’on sait qu’un panier de légumes en AMAP, même bio, coûte moins cher que tellement de malbouffe. Ces jeunes-là, je les vois aller se remplir au buffet à volonté du pseudo japonais du coin de la rue dont les produits surgelés proviennent de je ne sais où, fabriqués avec je ne sais quels ingrédients qu’on ne devrait pas manger si on s’inquiétait un peu de sa santé. Et quand ils me disent qu’ils n’ont pas le temps, alors vraiment, je me sens comme devant cette employée du Monoprix : impuissante et résignée.
Bénédicte